Opinions

Coronavirus : le confinement reste un luxe pour les africains

Plusieurs facteurs liés à l’Indice de Développement Humain ne permettent de se confiner en ce temps de crise sanitaire.

Le Bénin par la voix de son Président Patrice Talon a évoqué le fait du niveau du pouvoir d’achat de sa population ne lui permettait pas d’imposer un confinement total dû à la pandémie du Covid-19. Selon lui, la majorité des béninois « n’a pas les moyens » de supporter un confinement général de longue durée. « Contrairement aux citoyens des pays développés d’Amérique, d’Europe et d’Asie, la grande majorité des Béninois ont un revenu non salarial. Combien de personnes au Bénin ont un salaire mensuel et qui peuvent attendre deux, trois ou quatre semaines même sans travailler et vivre des revenus du mois ? […] Comment peut-on, dans un tel contexte où la plupart de nos concitoyens donnent la popote avec les revenus de la veille, décréter sans préavis, un confinement général de longue durée ? » (Jeune Afrique, 09 Avril 2020). Ces propos reflètent exactement la situation de plusieurs Etats africains où le niveau de vie caractérisé par des indicateurs tels que le PIB – Produit Intérieur Brut- par habitant, l’accès à l’éducation et l’espérance de vie à la naissance qui implique l’accès au soins de santé.

Leonard, Master de Géographie – Coiffeur . Photo: Vincent Fournier/JA

Si l’on s’en tient au seuil de 1 dollar US par personne et par jour, on constate que les ressources alimentaires sont faibles. En plus, nous avons une population en Afrique Sub-Saharienne (ASS) qui vit essentiellement de l’informel qui se définit comme « un ensemble d’unités produisant des biens et des services en vue principalement de créer des emplois et des revenus pour les personnes concernées. Ces unités, ayant un faible niveau d’organisation, opèrent à petite échelle et de manière spécifique, avec peu ou pas de division entre le travail et le capital en tant que facteurs de production. Les relations de travail, lorsqu’elles existent, sont surtout fondées sur l’emploi occasionnel, les relations de parenté ou les relations personnelles et sociales plutôt que sur des accords contractuels comportant des garanties en bonne et due forme » (BIT, 1993). Ce secteur est dit informel parce qu’il échappe à toute législation en vigueur fiscal et juridique censé l’encadrer. Il y a aussi le fait qu’il n’existe pas une comptabilité légalement tenue, les salariés non assuré à la sécurité sociale. Cependant, le secteur informel couvre l’économie des secteurs primaire, secondaire et tertiaire. Il regroupe les petites activités et entreprises rémunératrices, souvent individuelles ou familiales comprenant les marchands ambulants, les marchands sur étalages, les artisans, les cultivateurs, les employés de maison, les techniciens ambulants -cordonniers, coupeurs d’ongles, les chauffeurs-taxis, colleurs de seaux percés, réparateurs de réchauds à pétroles- et tout autre métier ou taches dont la législation n’arrive pas tracer. La plupart de ces métiers souvent appris dans le tas est le seul moyen pour la majorité de gagner leur vies. L’argent transitant de personnes à personnes échappe au fisc. On vit au jour le jour. Le chef de famille laisse une ration alimentaire journalière avant d’aller au boulot. Cette ration provient de ce qu’il a gagné la veille. Tout est serré. Tout se joue dans un mouchoir de poche. Les épargnes sont limitées et fragiles. Il suffit d’un deuil d’un proche pour vous souffler toutes ses économies. Les Etats n’ayant pas assez soutenue la sécurité sociale. L’Agence française de développement a relevé en 2006, après enquête sur le terrain, que 90 % des personnes actives exercent dans l’informel au Cameroun.

Vendeur ambulant de canne à sucre au quartier Tongolo à Yaounde. 2019

Voilà donc dans quelle situation la pandémie du Covid trouve les africains principalement ceux de l’ASS. Il est évident qu’un confinement total serait difficile à supporter pour les populations qui devront choisir entre le virus de la famine et celui du Covid-19. En d’autres termes, devra-t-on choisir entre être malade et mourir du Covid ou avoir sévèrement faim comme on en a jamais eu de sa vie. Il faut donc apporter des mesures d’accompagnement que les Etats africains doivent proposer à leur populations pour que ce confinement s’il faut qu’il soit respecté. Le virus étant mortel bien qu’on peut guérir tout seul, tout est mortel (Dr Etoa, Canal2International 2020): les poignets, les tables, les glaces des smartphones; le virus s’accrochent sur tout et reste actif pendant des heures voire des jours sur des matières de différentes natures.

Lire: Durée de survie du virus sur les matières

Le confinement total ne peut être supporté que par ceux qui peuvent remplir les frigos et faire des réserves de nourriture pour plusieurs jours. Ceux qui ont un pouvoir d’achat haut. Vivre de l’informel et faire quinze jours à la maison c’est mission impossible. Les mesures d’accompagnement ont été proposées par quelques chefs d’Etat de l’ASS pour supporter le confinement total ou partiel en vue d’éviter la progression du virus.

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